Même si Tristan n'insistait clairement pas, il mit tout ceci dans un petit coin de sa tête. Ce serait difficile à oublier. À la place, il se contenterait d'attendre tout en l'observant. De toute façon que pourrait-il faire d'autre ? Hormis chasser et passer du temps ensemble ? Ils étaient bien coincés dans ce monde par conséquent Tristan n'aurait pas grand chose à faire. Si ce n'était peut-être de surveiller les environs, sûrement par une simple question d'habitude. Bien qu'un peu de repos, il ne serait pas contre, parfois il se sentait si fatigué, il n'avait clairement pas le même train de vie que ses compagnons, lui était le plus souvent toujours à cheval, à faire l'éclaireur pendant que ses frères d'armes dormaient. C'était peut-être pour cette raison, qu'il piquait souvent du nez par-ci, par-là. Histoire de garder un semblant d'énergie. Son compagnon le remercia donc, et Tristan passa l'éponge. Pour le moment. C'était plus fort que lui, il fallait sans cesse qu'il le regarde, comme s'il savait qu'il cachait quelque chose, comme s'il pourrait presque lire à travers ses yeux, au plus profond de son âme.

En réalité, Tristan ignorait ce que ses ennemis pouvaient ressentir en l'ayant face à eux. Faisait-il peur ? Les intriguait-il ? Ou bien respectait-ils Tristan ? Peut-être un peu tout ça à la fois, allez savoir. En tout cas, il n'aimerait pas être à leur place, parce qu'il loupait jamais sa cible, même si cette dernière était loin de lui, très loin de lui. Il donna une légère tape amicale à Galahad, comme pour lui dire : moi aussi mon frère d'armes, moi aussi. De toute évidence, il préférait l'avoir comme allié que comme ennemi. Non pas qu'il aurait peur de Galahad, mais ça serait une chose terrible que de l'avoir comme ennemi. Ils se connaissaient que trop bien.

« De toute façon, tu perdrais. »

C'était de la taquinerie, bien évidemment. Parce qu'il ne voudrait même pas tenter de se battre réellement contre lui. Cela ne l'intéressait pas, il préférait nettement se battre avec lui, à ses côtés, que de devoir le combattre pour une quelconque raison. Lui ou un autre chevalier dans tous les cas, ça serait la même chose. Bien plus Galahad et Gauvain malgré tout, puisqu'il trainait davantage plus avec eux qu'avec les autres. Non pas que les autres étaient chiants, mais il avait juste l'impression que ses deux frères d'armes le comprenaient un peu mieux et qu'ils le prenaient comme il était, ni plus, ni moins.

Tristan ne comprit pas tout de suite la question de son compagnon d'armes. Il l'avait vu s'avancer vers le lac, alors il n'y avait pas trop prêté attention sur le moment. Il suivit donc son regard, et ce fût à ce moment-là qu'il comprit qu'il parlait de sa blessure. Ah un sacré petit souvenir de Cerdic. Un coup qui l'avait fait reculer de quelques pas, ne serait-ce que le temps d'identifier les dégâts, savoir la gravité avant de reprendre le combat. Tristan garda son calme et sa sérénité, comme si que ce n'était rien, absolument rien. Comme s'il n'en garderait aucune cicatrice, alors que c'était inévitable.

« Ce n'est rien. C'était sur le champ de bataille. »

Il disait cela avec un certain détachement, comme s'il s'en moquait pas mal, alors qu'au fond, s'il n'avait pas traversé ce portail, il serait mort. Mais à en juger par l'inquiétude de Galahad, Tristan n'osa même pas retirer son haut. Là, son bout de tissu cacha un peu les dégâts.